Le Guaguancó

Le Guaguancó est la forme du complexe de la Rumba la plus répandue.

Naissance du Guaguancó

Les origines du Guaguancó sont très discutées et plusieurs hypothèses sont avancées. Certains estiment que cette forme de la Rumba est née dans les années 1880 à Matanzas. Selon le chercheur Jesús Blanco, les premiers musiciens de Guaguancó ont été Anselmo et Matías Calle, joueurs de Yambú et membres du cabildo appelé Congo Musundi. Ce furent les créateurs du premier coro nommé La lirita dans le quartier de Simpson. Ensuite, le Guaguancó aurait été amené à la Havane entre 1896 et 1897 durant la Guerre d'indépendance.

Pour d'autres, le Guaguancó émerge des solares (cours intérieures des grands immeubles collectifs où s'entassent les familles pauvres) et des docks des ports de la Havane au début du 20ème siècle.

Pour quelques uns, le Guaguancó se serait imposé à la Havane grâce à certains interprètes de Flamenco. On sait en effet que jusqu'au début du 20ème siècle, quelques grands chanteurs de Flamenco, dont Pericón de Cádiz ou José el de la Matrona, résidèrent à la Havane.

En tout cas, beaucoup s'accordent à penser que le Yambú est le prédécesseur du Guaguancó qui a également assimilé des éléments de la Columbia.

Les origines du mot "guaguancó" sont également assez obscures. Francisco Raúl 'Machito' Gutiérrez Grillo affirme que son origine réside dans l'expression "ir de guaguancó" qui signifie "monter dans un autobus sans payer". Le mot pourrait aussi être lié aux guaguas, morceaux de canne à sucre ou planches frappées avec 2 fines baguettes qu'utilisaient les Congos en guise de tambour. Dès 1893, le mot guaguancó fait partie du lexique musical puisque ce nom est donné à un Danzón.

Le morceau Guaguancó coro miyaré est considéré comme étant le premier des Guaguancós.

De nos jours, il n'est pas rare de trouver un passage ou un rhytme de Guaguancó dans la Salsa ou la Timba.

Les instruments

Au départ, les coros (groupes de chanteurs, danseurs et musiciens) comprenaient plusieurs dizaines de personnes. Ils se produisaient dans les rues de la Havane. Ces ensembles comprenaient des percussions (tambours, claves et autres percussions mineures) mais aussi une basse, un tres et des chanteurs. Au fur et à mesure, l'orchestration s'est simplifiée et rassemble aujourd'hui moins de musiciens.

L'ensemble percussif du Guaguancó est caractérisé par l'utilisation de 3 tambours tumbadora ou conga bien qu'à l'origine, les cajones (caisses en bois) étaient utilisés comme pour le Yambú. Il est communément admis que les congas dérivent des tambours de Makuta utilisés par les Congos.

Guaguancó (conga)
Guaguancó (conga)

Ces tambours portent les noms de :

  • salidor, tumba, tumbadora, bass ou hembra, tambour le plus grave qui maintient la rythmique ;
  • tres-dos, tres golpes, segundo, repicador, llamador, macho ou seis por ocho, tambour moyen qui complète la base rythmique ;
  • quinto, tambour le plus aigu qui improvise et agrémente la base rythmique de floreos (décorations).

Cet ensemble est complété :

  • de claves ;
  • d'une guagua (morceau de bambou) frappée grâce à des palitos (baguettes) qui peut aussi être une cajita (petite caisse en bois) percutée avec des cuillères. Le rythme joué par cet instrument est souvent appelé catá ;
  • de marugas (shakers en métal) ;
  • de chekerés.

La structure du Guaguancó

La structure du Guaguancó n'a pas changée depuis son origine. C'est d'abord la clave en 3/2 ou plus rarement en 6/8 qui débute pour établir le rythme de base. Puis, les autres instruments entrent progressivement.

Le chant peut alors commencer par la diana qui donne la tonalité du morceau. Durant cette courte partie, le chanteur soliste ou gallo (qui signifie "coq") prononce des sons sans signification : "belé belé belé", "a la la la", "a na na na"... Certains y voient une influence du Cante jondo, un chant flamenco andalou.

Vient ensuite le canto qui est composé :

  • d'une longue première partie appelée la tema qui expose le thème du morceau, improvisée par le chanteur soliste parfois accompagné de quelques chanteurs du chœur. On dit que le chanteur est en train de decimar bien qu'il n'utilise pas forcément la décima. Contrairement aux autres formes de Rumbas, il n'est pas fait usage de virtuosités mélodiques de chant ;
  • d'une seconde section nommée l'estribillo (refrain) dans lequel tout le chœur ou vasallo se joint au chanteur soliste.

S'installe alors un dialogue, appelé le montuno, entre le soliste (tambour ou chanteur) qui mène l'inspiración (improvisation) et le chœur qui répète à l'unisson le capetillo (courte phrase de support/relance pour celui qui improvise). L'intensité et le tempo de cette partie responsoriale ne cesse d'aller crescendo pour se terminer sur le cierre (phrase de conclusion).

Aujourd'hui, une grande place est accordée à la partie du montuno car c'est également la partie dansée. Cependant, les "anciens" soutiennent que le Guaguancó proprement dit n'est que la partie narrative du canto.

Plus complexe que celui du Yambú, le texte, en espagnol, est narratif. Il raconte les problèmes de la vie quotidienne rencontrés dans le milieu rumbero ou dans le quartier comme l'amour, l'amitié, la protection sociale, la satire de la société, la politique, le sentiment patriotique, la frustration... C'est une vraie chronique de la vie du peuple, humoristique, parfois poétique. Il peut arriver que les paroles servent à stimuler les participants en les provoquant avec des canto de puya.

Traditionnellement, le chanteur soliste improvisait suivant la structure de la décima (strophe de 10 vers octosyllabique), forme qui marque l'influence espagnole et plus particulièrement andalouse sur le Guaguancó. Sont également utilisés le pareado (strophe de 2 vers) ou la prose.

Le Guaguancó new-yorkais

Guaguancó new-yorkais
Guaguancó new-yorkais

Dans les années 1960, lorsque la Salsa se cherchait un nom, une mouvance musicale naît à New York sous le nom de Guaguancó. Il faut être vigilent car cette appellation désigne une Salsa énergique, souvent porteuse d'un message, qui n'a pas grand chose à voir avec la Rumba cubaine originale. Pourquoi avoir choisi le même non ? Peut être parce que le Guaguancó cubain a été une des influences du Guaguancó new-yorkais, comme on peut par exemple le noter avec l'utilisation du lalaleo durant l'introduction.

Cette musique privilégie en général la section de cuivre. La rythmique est très stable et soutenue. Le piano répète un leitmotiv qui renforce la stabilité rythmique.

Le rythme

Le Guaguancó se joue à un rythme rapide mais pas aussi vite que la Columbia. Sa rythmique est riche et plus complexe que celle du Yambú.

Il existe 2 versions du Guaguancó. Voici une version de la Havane :

Guaguancó habana (clave)
Guaguancó habana (clave)
Guaguancó habana (tumba)
Guaguancó habana (tumba)
Guaguancó habana (repicador)
Guaguancó habana (repicador)
Guaguancó habana (guagua)
Guaguancó habana (guagua)

Voici un exemple de Guaguancó de Matanzas :

Guaguancó matancero (claves)
Guaguancó matancero (claves)
Guaguancó matancero (tumba)
Guaguancó matancero (tumba)
Guaguancó matancero (repicador)
Guaguancó matancero (repicador)
Guaguancó matancero (guagua)
Guaguancó matancero (guagua)

Le quinto improvise en s'appuyant sur ces bases rythmiques.

Parmi les groupes ou interprètes majeurs de la Rumba, on peut citer :

  • Los Muñequitos de Matanzas
  • Clave y Guaguanco
  • Yoruba Andabo
  • Afrocuba de Matanzas
  • Conjunto Folklórico Nacional de Cuba
  • Los Papines
  • Afrekete
  • Celeste Mendoza

Bien qu'il existe de nombreuses compositions de Guaguancó, que peu d'entre elles ont pu obtenir une large diffusion dans le pays ou hors des frontières. La plupart font partie de la connaissance collective propre à chaque quartier que les nouveaux rumberos adaptent et ré-interprètent sans cesse à leur manière.

Voici quelques Guaguancós que vous pouvez écouter :

  • "La Habana" (2006) de El All Stars De La Rumba Cubana - Guaguancó
  • "Mamaita... What you've got?" (1997) de Clave y Guaguanco - Guaguancó
  • "Para 'Rita' Montaneré (1997) de Clave y Guaguanco - Guaguancó
  • "La Rumba que no termina" (2006) de Clave y Guaguanco - Guaguancó
  • "El tren de la Rumba" (2006) de Clave y Guaguanco - Guaguancó
  • "Perdón" (1996) de Yoruba Andabo - Guaguancó
  • "La llave" (2002) de Los Muñequitos de Matanzas - Guaguancó
  • "Conga Yambumba" (2005) de Vocal Sampling - Guaguancó
  • "Cuando tu quieras a mi Guaguancó" de Chivirico Davila - Guaguancó new-yorkais

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